L’association Aristote proposait le 27 avril 2017 à l’Ecole Polytechnique une conférence intitulée « Demain, l’économie bleue ». Notre Directrice Innovation, Laetitia Brottier, nous raconte cet évènement.
L’ « économie bleue » est l’expression utilisée par Gunter Pauli, entrepreneur belge de solutions industrielles zéro pollution.
Une dizaine d’intervenants sont venus nous éclairer sur le changement climatique et les nouveaux modèles pour les générations présentes – et oui, on ne peut plus parler de générations futures maintenant…
Valérie Masson-Delmotte du GIEC (Groupe d’Experts Intergouvernemental sur l’Evolution du Climat) a synthétisé les principaux enseignements du rapport du GIEC. Sa conclusion a mis en exergue le fait que – pour rester en dessous des +2°C fatidiques négociés lors de l’accord de Kyoto, l’être humain pouvait se permettre d’émettre jusqu’à 2900 GtCO2. 2100 GtCO2 ont déjà été émis. La question est de savoir qui aura le droit d’émettre les 800 GtCO2 restant (sachant qu’on est actuellement à un rythme d’environ 50GtCO2/an) entre pays industrialisés – qui ne souhaitent pas voir leur économie impactée – et pays en émergence – qui veulent avoir le droit d’améliorer leur niveau de vie en se développant. Question épineuse ! En savoir plus : leclimatchange.fr
Daniel Evain, ingénieur agronome, a ensuite témoigné de sa propre transition, de son parcours vers un autre modèle. De sélectionneur de graine pour Cargill et Montsanto, il a repris la ferme de céréales de son père en agriculture bio. Voici ce qu’il en a retiré et les messages qu’ils délivrent :
1) privilégier les circuits courts (AMAP, La ruche qui dit oui…), car on se reconnecte avec des réalités locales et de terrain – mauvaises récoltes, fruits de saison, prix juste pour le producteur, et
2) réapprendre à cuisiner en fonction des saisons.
Julia Faure de « la Ruche qui dit oui », nous a présenté cette plateforme internet qui facilite le circuit court sans engagement. Déjà 1000 « ruches » (point pour récupérer ses achats) en France, et des centaines dans les pays voisins. Elle témoigne d’une prise de conscience du consommateur, qui exige des produits locaux.
Thibault Turchet de Zéro Waste France nous a alerté sur l’importance de diminuer tous les déchets, et témoigner de l’efficacité des bonus/ malus là où ils ont été mis en place. Pour Brieuc Saffré, pensez circulaire, c’est une évidence des écosystèmes : les déchets des uns sont les ressources des autres. Pensez à tous les co-produits possibles et faire de vos déchets des impacts positifs. Il a cité l’exemple des véhicules de La Poste qui reviennent avec des corbeilles de papiers issues du tri sélectif des bureaux au lieu de revenir à vide. Ce papier est ensuite recyclé par La Poste pour éditer les enveloppes.
Ce fut au tour de Yves Marignac porte-parole de l’association Négawatts de nous présenter le scénario NégaWatts 2017. Ce scénario énergétique pour la France est proposé d’une vingtaine de spécialistes dotés d’une vraie expérience terrain de l’énergie et de son économie. Leur constat est fort : en mettant de l’intelligence et de l’optimisation énergétique, sans modifier notre confort, il est possible d’économiser 70% de l’énergie que l’’on consomme aujourd’hui. Oui, 70%. Cela implique notamment de rénover massivement tous les logements anciens, d’éteindre les appareils en veille, de passer à un éclairage aux ampoules LED qui éclairent là où l’on a vraiment besoin de la lumière… Pour les 30% d’énergie dont on a vraiment besoin, l’énergie fossile n’est plus nécessaire. Les renouvelables peuvent assurer la production à condition d’être stockée pour le transport, en batterie pour les trajets urbains (du quotidien) et en méthane pour les trajets interurbains (transport de marchandises). En méthane parce que le réseau de gaz de ville est déjà très développé, que le méthane est un gaz sûr, et que le volume du réseau de gaz de ville permet par sa taille de gérer un stockage inter saisonnier (le déficit de soleil en hiver par rapport à l’été). Pour ce niveau de consommation très faible, même le nucléaire n’est pas nécessaire, ce qui est une bonne nouvelle, car il s’agit d’une énergie de stock (donc finie) et non d’une énergie de flux comme peuvent être l’éolien ou le solaire. La révolution énergétique c’est d’abord la traque à l’énergie inutile ! Beau programme, surtout qu’il avoue que si ce chantier titanesque d’intelligence énergétique (appelé aussi sobriété dans le scénario) n’est pas commencé dans les 5 ans, le scénario ne permettra plus d’atteindre la neutralité carbone d’ici 2050…
Je retiens le très bel exemple de Patrick Bellet, propriétaire du Leclerc de Pont L’Abbé. Ce dernier a mis en oeuvre les principes de l’économie bleue à l’échelle de son magasin. Des camions en location, au filtrage des eaux de pluie de son parking, en passant par un projet d’emballage alimentaire en papier pierre avec la pierre locale, sans oublier la production locale (dans un des étages) d’une algue appelée spiruline. Son magasin s’engage localement et très concrètement pour avoir un impact positif sur la planète.
Enfin, Julien Leconte a présenté le concept de blockchain, qui réinvente la transparence par les outils numériques. Les scandales de viande de cheval ne seront-il bientôt tout simplement plus possible ?
En résumé, une très belle journée avec des intervenants pertinents et des exemples très inspirants d’espoir pour agir.
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